Frères et Sœurs,
Nous venons d’entendre dans le récit de la Pentecôte qu’un bruit survint du ciel comme un violent coup de vent qui remplit toute la maison. Puis, des langues de feu se posent sur chacun d’eux. Le don de l’Esprit Saint ne se manifeste donc pas de façon insignifiante, discrète ou même cachée.
C’est vraiment une force qui bouleverse la vie des disciples, qui illumine leur intelligence des Écritures, qui brise leur peur et leur résistance à s’exprimer et les rend capables de se faire comprendre à une grande diversité de personnes, de langues, de cultures.
Comment rendre compte aujourd’hui de cette force inouïe que l’Esprit Saint répand sur chacun de nous par notre baptême et notre confirmation, mais aussi de ce feu que Jésus fait jaillir sur le monde pour toucher le cœur du plus grand nombre ?
D’abord en étant nous-mêmes témoins de Jésus. Comme Saint-Paul le dit dans la 2e lecture « personne n’est capable de dire Jésus est Seigneur sinon dans l’Esprit Saint ». Or, affirmer que Jésus est Seigneur, c’est reconnaître qu’il est vraiment Dieu et donc que sa parole est divine. Qu’elle mérite d’être accueillie en nous pour ce qu’elle est !
La première parole de Pierre à la Pentecôte a été d’annoncer à tous que ce Jésus, qu’ils avaient crucifié, était ressuscité des morts, élevé à la droite de Dieu le Père et désormais le Sauveur de l’humanité. Mais tout commence donc par ce feu de l’Esprit Saint qui se pose sur chacun d’eux pour enflammer leur cœur. Nous aussi laissons-nous toucher par le feu de l’Esprit Saint. Qu’il vienne consumer en nous le péché, comme l’annonce Jésus dans l’Évangile en donnant ce pouvoir aux apôtres.
En devenant ses témoins, l’Esprit vient chasser nos peurs comme celle des disciples enfermés chez eux. Nous avons tant de peurs qui nous paralysent et pas seulement celle du virus, c’est-à-dire au fond la peur de mourir. La pandémie a exacerbé en nous des peurs plus anciennes, plus cachées, comme celle d’un avenir incertain. Du nôtre, celui de nos enfants, mais aussi l’avenir de la planète en raison des dérèglements climatiques, de la pollution et puis la peur de la sécularisation de la société. La peur de voir disparaître la religion, c’est-à-dire le lien avec Dieu, et donc peut-être la foi chrétienne elle-même.
À plusieurs reprises dans l’Évangile de ce jour, Jésus dit à ses apôtres : « la paix soit avec vous ». Cela peut apparaître comme une formule de politesse, mais pas ici où elle précède l’envoi en mission des apôtres. La paix que donne le Christ est vraiment un don de Dieu qui chasse nos peurs, c’est un don de l’Esprit Saint comme le dit Saint-Paul dans sa lettre aux Galates : « Les fruits de l’Esprit, c’est l’amour, la joie, la paix, la patience, la bonté, la bienveillance, la fidélité, la douceur et la maîtrise de soi. » Ga 5, 22.
Tout le contraire de la tristesse, du repli sur soi, de l’individualisme, de la violence, des fausses nouvelles, des paroles blessantes. Tout ce que nous voulons rejeter au fond, mais qui nous atteint tout de même, malgré nous bien souvent. Que l’Esprit Saint nous en libère pour nous combler de la paix qui vient du Christ.
La force inouïe de l’Esprit Saint chasse nos peurs et nous rend témoins de l’espérance. Ainsi libéré de notre tristesse, l’Esprit Saint nous pousse à construire avec les autres un monde selon le cœur de Dieu. L’Esprit descend comme des langues de feu sur chacun, mais c’est toute la maison qui en est remplie. On n’est pas chrétien tout seul comme on n’est pas humain tout seul.
Comme le dit Saint-Paul : « les activités sont variées mais c’est le même Dieu qui agit en tout et en tous. » Nous rendons compte de la force inouïe de l’Esprit Saint quand chacun prend sa place dans le Corps, dont le Christ est la tête. Nous avons tous quelque chose à faire pour les autres, même des services les plus humbles, comme le dit encore Saint-Paul : « à chacun est donnée la manifestation de l’Esprit en vue du bien. » La pandémie a montré à quel point, même les services les plus modestes comme distribuer le courrier, les journaux, ramasser les ordures… étaient vraiment nécessaires « en vue du bien ».
En nous obligeant à nous confiner chez nous, la pandémie nous a fait prendre conscience de notre fragilité, mais aussi de la nécessité d’être plus solidaire. L’Esprit Saint nous donne cette force d’âme qui nous pousse à construire un Corps plus uni malgré notre grande diversité, nos sensibilités politiques ou religieuses. Plus unis et plus solidaires, où chacun prend soin des autres, et où aucun membre n’est mis de côté.
Comme le dit Saint-Paul : « Tous les membres, malgré leur nombre, ne forment qu’un seul corps. » Au fond nous retrouvons dans ces trois manifestations de l’Esprit Saint, la force que Dieu nous donne dans les vertus théologales que sont la foi, l’espérance et la charité.
• Que le feu de l’Esprit Saint fasse grandir en nous la foi en Jésus, Lui qui est le chemin, la vérité et la vie, et que nous en soyons des témoins vivants.
• Que le feu de l’Esprit Saint fasse grandir en nous l’espérance. Que cette espérance habite notre cœur et soit pour nous et pour les autres une lumière qui brille dans l’obscurité, lorsque viennent le découragement et le doute.
• Que le feu de l’Esprit Saint fasse grandir en nous la charité, car il n’y a pas de plus grand amour que de s’oublier soi-même pour se mettre résolument au service des autres pour le bien commun.
Et j’ajouterai que la paix de Dieu nous remplisse de joie comme elle a rempli le cœur des apôtres et les a fait sortir de leur torpeur. Cette joie spirituelle qui vient de l’Esprit Saint est communicative et nous en avons bien besoin aujourd’hui. Elle est source de vie et de renouveau.
Viens Esprit Saint, viens combler nos cœurs, viens nous consoler et nous conduire vers la vérité tout entière. Amen
† Laurent DOGNIN
Évêque de Quimper et Léon